OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Comment le Royaume-Uni renouvelle son éducation aux sciences http://owni.fr/2011/06/15/comment-le-royaume-uni-renouvelle-son-education-aux-sciences/ http://owni.fr/2011/06/15/comment-le-royaume-uni-renouvelle-son-education-aux-sciences/#comments Wed, 15 Jun 2011 11:39:59 +0000 Marion Sabourdy http://owni.fr/?p=35235 La main à la pâte. De son côté, le Royaume-Uni a lancé le National Science Learning Centre. Sir John Holman, son ancien directeur, nous le présente.]]> Du 6 au 8 mai derniers se tenait à Bruxelles la première conférence Scientix . Au programme : présentations, posters et rencontres autour de l’éducation scientifique en Europe. Entre deux tweets , nous avons interviewé Sir John Holman, un des hommes les plus actifs du Royaume-Uni dans ce domaine.

Quel est votre parcours ?

Je suis professeur dans le département de Chimie de l’Université de York (Royaume-Uni), mais ma spécialité principale est l’éducation aux sciences. J’ai été également directeur d’école pendant plusieurs années [ainsi que conseiller auprès du gouvernement britannique et concepteur de programmes scolaires]. En 2004, j’ai lancé le « National Science Learning Centre » [Centre national d’apprentissage des sciences] qui est dédié à la formation des enseignants de sciences. Je l’ai dirigé depuis son ouverture et viens tout juste de quitter ce poste.

Qu’elles sont les spécificités du « National Science Learning Centre » (NSLC) ?

Le NSLC est un genre différent de centre de sciences. Contrairement à la Cité des Sciences, à Paris, qui touche directement les enfants et leurs parents, notre centre n’est pas ouvert aux jeunes. Il permet aux enseignants en sciences (biologie, physique, mathématiques…) de primaire et de secondaire de tout le Royaume-Uni de venir se former professionnellement et ce, gratuitement. De ce que j’en sais, notre centre est le seul de ce genre en Europe. Et c’est également le plus gros. Il a coûté environ 40 millions d’euros pour l’installation et accueille 5000 enseignants par an en moyenne, encadrés par 60 personnes.

Quelle formation proposez-vous aux enseignants ?

Prenons l’exemple d’un groupe de professeurs de physique. Pour suivre une de nos formations, ceux-ci se déplaceront pendant trois jours dans notre centre. Nous disposons de notre propre hôtel et de notre propre restaurant. Pendant ce séjour, nous leur présenterons un aperçu des recherches en cours (par exemple les activités du CERN ou le domaine de la physique des particules). Ils suivront également des sessions sur les nouvelles expériences qu’ils peuvent présenter à leurs étudiants. L’idée est qu’ils « piquent » quelques bonnes idées pour compléter leur enseignement.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Ensuite, ils rentrent dans leur école et mettent en œuvre un projet, avec leurs propres élèves, basé sur ce qu’ils ont vu chez nous. Deux ou trois mois plus tard, les enseignants reviennent dans le centre pour une nouvelle session de deux jours où ils évoquent ensemble leurs projets respectifs et suivent de nouveaux cours et ateliers. En tout, ils passent donc cinq jours ensemble. C’est très intense et finalement assez long, comparativement aux sessions classiques de formation d’une demi-journée ou d’un soir. Cette formation leur donne une expérience véritablement forte, qui marque le reste de leur carrière.

Qui peut suivre ces formations ?

Le NSLC est ouvert à tous les professeurs de sciences du Royaume-Uni. Nous accueillons aussi bien des enseignants de biologie, que de physique, de chimie ou de géologie… La plus grande difficulté vient parfois de la réserve de certains directeurs d’établissement, qui n’aiment pas trop laisser venir leurs professeurs. En effet, pendant ce temps, la classe doit être gérée par quelqu’un d’autre et cela peut poser problème. Le NSLC, centre national, est situé dans l’Université de York mais il en existe également dans les neuf régions d’Angleterre .

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Comment avez-vous monté ce projet ?

En 2001 se sont tenues les élections législatives au Royaume-Uni. Dans ce cadre, chaque parti a produit un manifeste. Le « Labour Party » [Parti travailliste de Tony Blair] a indiqué dans le sien la volonté d’établir un tel centre pour l’éducation aux sciences. Ce parti a finalement gagné les élections et tenu ses promesses. Pour ce faire, ils se sont associés avec le Welcome Trust, une très grosse fondation qui brasse des milliards d’euros. Le gros de leur activité concerne la recherche médicale (malaria, VIH, santé mentale…). Cette fondation a réalisé que si nous voulons une recherche de bonne qualité, il faut de bons scientifiques et donc de bons professeurs. Ils ont décidé d’investir 25 millions de livres sterling [un peu moins de 30 millions d’euros] dans ce projet.

Le gouvernement et cette fondation ont alors lancé un appel d’offre auprès d’universités pour construire un tel centre. Nous – l’Université de York – avons remporté cet appel d’offre avec les universités de Leeds et de Sheffield, toutes situées dans le comté du Yorkshire. Nous avons utilisé 11 millions de livres [environ 13 millions d’euros] pour construire le bâtiment et le reste pour engager des gens et payer la venue des enseignants pendant les cinq premières années.

Comment avez-vous financé le centre après ces cinq ans ?

Après ces débuts, nous avions besoin d’environ 30 millions de livres [35 millions d’euros] supplémentaires pour poursuivre notre action sur cinq nouvelles années. Nous avons décidé de nous tourner en partie vers l’industrie, en rencontrant les responsables de dix firmes scientifiques ou techniques, comme Rolls-Royce, British Petroleum, GlaxoSmithKline, AstraZeneca, Vodafone… Nous leur avons présenté notre projet et demandé un million de livres chacune, sur cinq ans. Le Welcome Trust a ensuite accepté de compléter ces 10 millions de livres avec 10 autres millions, tout comme le gouvernement. Heureusement, cette recherche de fonds a eu lieu juste avant la crise. Je pense que nous ne pourrions pas le refaire à l’heure actuelle. Ce partenariat entre le gouvernement, une fondation importante et de grandes industries prouve en quoi l’éducation aux sciences est importante.

Le partenariat avec les industries est-il seulement pécuniaire ?

Non. Les bonnes relations avec l’industrie sont bien plus importantes que l’argent. Par exemple, une industrie comme Rolls-Royce peut nous fournir des exemples récents d’ingénierie que nous pouvons présenter aux enseignants en formation. Ils peuvent également envoyer des ingénieurs et des chercheurs dans les écoles. De plus, ils décernent un important prix, d’une valeur de 15 000 livres [17 000 euros], le « Rolls Royce Science Prize » destiné aux enseignants qui proposent les meilleurs projets d’enseignement scientifique.

Que recherchez-vous dans une conférence comme celle de Scientix ?

J’ai été invité par « European Schoolnet » pour une intervention sur l’importance de l’éducation aux sciences en Europe et la manière dont nous pouvons l’améliorer. De la conférence Scientix, j’espère tirer de bonnes idées et faire des rencontres. Je suis particulièrement intéressé par les nombreuses activités développées en Europe de l’est. Ces nouveaux membres de l’Union européenne ont vraiment de très bonnes idées. Le niveau des sciences et des maths y est très élevé. La Hongrie, par exemple, a quelques-uns des meilleurs mathématiciens du monde. L’intérêt de cet événement est qu’il semble attirer des gens qui ne vont pas en général aux conférences internationales. Connaissez-vous l’expression « usual suspects » ? Elle désigne les gens que vous rencontrez tout le temps. Ici, j’ai croisé des habitués bien sûr, mais aussi et surtout des jeunes.

Pourquoi se focaliser sur les enseignants et non les chercheurs ou les ingénieurs ?

Beaucoup de chercheurs considèrent l’éducation aux sciences comme secondaire. Ceux qui comprennent l’importance de l’éducation sont très rares, comme par exemple le français Pierre Léna, à l’origine du programme La Main à la Pâte. Dans les industries, le problème se pose d’une manière différente. Les ingénieurs, notamment les plus jeunes, sont très concentrés sur leurs objectifs car le profit l’emporte. C’est très dur pour eux de dévier de l’objectif qu’on leur a assigné, surtout s’ils viennent juste d’intégrer une société ou s’ils ont une jeune famille et beaucoup d’engagements. Ceux qui s’intéressent néanmoins aux problématiques d’enseignement ont besoin de chefs particulièrement ouverts ou bien sont très actifs lors de leurs temps libre. C’est peut-être plus facile pour les ingénieurs plus âgés, mais nous avons besoin de jeunes, et surtout des femmes, pour jouer le rôle d’ambassadeurs dans les écoles. Grâce à eux, les jeunes se disent : « ils sont jeunes, dynamiques et… ingénieurs ! Wahou ! Ce ne sont pas des genres de nerds ».

Qu’est-ce que les enseignants ont de plus que les chercheurs et ingénieurs, pour toucher les jeunes ?

Les professeurs sont ceux qui parlent directement aux personnes qui apprennent. Chacun peut toucher la vie d’une centaine de jeunes gens. Les professeurs d’université ne sont pas les plus accessibles, mais tant pis. Je crois que le futur réside dans les mains des enseignants du primaire et du secondaire. J’ai moi-même été enseignant au secondaire pendant plus de 30 ans. J’ai eu l’opportunité de parler de mes projets dans une trentaine de pays sur plusieurs continents avec des gens passionnants. J’ai envie que des jeunes gens brillants comme ceux qui sont présents ce weekend, puissent avoir ces opportunités d’apprendre des autres pays et de propager leurs propres idées.

Les ingénieurs sont importants mais nous gagnerons plus à nous concentrer sur les professeurs et rendre ce secteur plus professionnel. Beaucoup de pays ne valorisent pas vraiment leurs enseignants. Ils n’ont pas un statut social très élevé. Pourtant, c’est la prochaine génération d’enseignants et d’activistes qui est importante car un tel projet se déroule sur 50 à 100 ans. Ce n’est pas quelque chose qui se met sur pied en 10 ans. Le challenge va devenir de plus en plus important pour former les scientifiques dont nous avons besoin.


>> Illustrations : portrait de Sir John Holman en CC by-sa par Scientix, autres photos sur Flickr, licence CC CARLOS62 Argonne National Laboratory, Scott Hamlin

>> Propos recueillis avec Stéphane Nai-Im Tholander

>> Article initialement publié sur Knowtex sous le titre Sir John Holman : l’éducation aux sciences est critique pour le futur de l’Europe

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Squelettes, passe-murailles et modélisation 3D http://owni.fr/2011/02/08/squelettes-passe-murailles-et-modelisation-3d/ http://owni.fr/2011/02/08/squelettes-passe-murailles-et-modelisation-3d/#comments Tue, 08 Feb 2011 16:22:00 +0000 Marion Sabourdy http://owni.fr/?p=34053 Le 9 décembre dernier, je traversais le Pont des Arts en évitant les plaques de glace et me dirigeais vers l’Académie des sciences. Au programme : la présentation d’un numéro spécial « Palévol » des compte-rendus de l’Académie sur l’utilisation de la 3D en paléontologie et paléoanthropologie. L’institution avait fait les choses en grand : invitation de plusieurs journalistes, goûter, et surtout présence des académiciens Jean Dercourt et Philippe Taquet (également paléontologue et auteur), du dessinateur scientifique Didier Geffard-Kuriyama, du paléontologue Gaël Clément et du paléoanthropologue Antoine Balzeau. Tous ont présenté leurs activités ou les avancées de la 3D dans leurs disciplines. Rien de révolutionnaire donc, mais un état des lieux très intéressant.

Pour constituer cet imposant ouvrage (216 pages), D. Geffard-Kuriyama et G. Clément ont fédéré 20 contributions scientifiques indépendantes de 85 auteurs de 13 nationalités, dont la plupart ont entre 30 et 40 ans. Le résultat est une revue pluridisciplinaire (paléontologie, paléoanthropologie, archéologie, biologie), qui évoque de nombreux objets d’étude du micron au mètre (plantes, invertébrés, vertébrés, homme…), depuis – 400 millions d’années jusqu’à aujourd’hui.

Les nouveaux passe-murailles

Philippe Taquet y signe un article de synthèse intitulé L’imagerie 3D appliquée à la paléontologie et la paléoanthropologie : les nouveaux passe-murailles (PDF), en hommage à la nouvelle de Marcel Aymé (1943). Il y fait un détour historique du côté de l’anatomie comparée et de Cuvier, qui préparait le « squelette de nombreux poissons en désarticulant les os du crâne » afin d’en comprendre l’agencement. Une technique que les paléontologues ne peuvent pas imiter, eux dont les organismes étudiés sont enchâssés dans des gangues de pierre et donc souvent inaccessibles à la vue (notamment les parties internes).

Il se souvient, avec Jean Decourt, du professeur Jean-Pierre Lehman (MNHN), qui a introduit en France une nouvelle technique. Il découpait avec une scie diamantée de minces pellicules de fossiles de poissons pour les photographier et reconstituer un modèle en cire. Nouvelle technique précise, certes, mais terriblement longue (un à deux ans pour la reconstitution) et surtout destructrice, tout comme l’usage d’acides pour dissoudre la roche autour des fossiles.

L’apparition des rayons X en 1895 (néanmoins peu précis), puis leur couplage avec l’ordinateur (« computed tomography ») à partir des années 1970 ont «  permis une véritable révolution dans l’examen du vivant. L’ordinateur est capable de restituer l’ensemble d’un organisme qui a été balayé plan après plan par les faisceaux de rayon X et d’en proposer une image virtuelle en trois dimensions ». La fin de son article est une liste des structures rendues visibles (tracé des nerfs et des vaisseaux, forme de la cavité cérébrale, contours et limites de chaque os…) et de techniques (tomographie à haute résolution, rayonnement X synchrotron en contraste de phase, numérisation surfacique).

Du citron au dinosaure

D’après Gaël Clément, « quand le public voit un fossile, il pense que c’est un « fantôme » grossier de l’animal. Pourtant, un fossile n’est pas un moulage, car chaque élément de l’animal est conservé, par exemple la dentine ou les os très fins de l’endocrâne ». Et le chercheur de donner plusieurs exemples développés dans l’ouvrage. Les coupes virtuelles d’un citron carbonisé de 2700 ans ont permis de déterminer les voix de commerce du citron autour de la méditerranée dans l’Antiquité. Des fossiles de chimères de 340 millions d’années complètement écrasés ont pu être dégagés virtuellement, redressés et moulés en 3D grâce à une imprimante spéciale. La visualisation d’un placoderme de 400 millions d’années a permis de mettre en évidence des structures fossiles cachées et impossible à préparer au microscope, comme un fin réseau neurovasculaire.

Des insectes piégés dans de l’ambre fossile opaque ont pu être visualisés grâce au synchrotron de Grenoble (larve de coléoptère de moins d’un millimètre, araignée de 500 microns… tout un bestiaire effrayant digne de la science-fiction). La numérisation permet de comparer l’anatomie des fossiles avec les animaux actuels (par ex. crânes de requins) ou d’analyser des complexes anatomiques comme la morphologie de l’oreille interne à la transition entre les dinosaures et les oiseaux (audition, équilibre, locomotion…). Les ordinateurs permettent également de modéliser des contraintes mécaniques, comme les forces appliquées sur les poignets des grands vertébrés (éléphants). Les muséologues s’intéressent également à ces études pour pouvoir reconstituer les squelettes de manière la plus réaliste possible. Dernier exemple, et non des moindres : la « renaissance » des organismes fossiles par images de synthèse (muscles, peau, locomotion…) pour des films de fiction ou de vulgarisation.

La 3D : un coût, une conservation, le partage

Au-delà des prouesses techniques, plusieurs éléments ont attiré mon attention lors de cette conférence. Le premier est le coût de ces acquisitions : 500 euros pour la tomographie d’un spécimen moyen, selon Gaël Clément ! De plus, les appareils, comme le synchrotron de Grenoble, ne sont pas accessibles librement. « Il faut envoyer un projet de recherche à une commission pour qu’elle détermine si les chercheurs ont droit à un certain temps de faisceau ». Le synchrotron de Saclay a carrément dédié une de ses « lignes » aux matériaux anciens (mais n’en est pas moins surbooké). Quant au Muséum national d’Histoire naturelle, il a d’or et déjà lancé une politique d’acquisition d’appareils, mutualisés à l’ensemble de ses collections.

Le second élément est celui de la conservation de ces données numérisées. A priori, les données brutes doivent toujours accompagner l’holotype (l’objet numérisé), le modèle virtuel et la réplique 3D (parfois plusieurs fois plus grande que l’holotype). Il va sans doute falloir agrandir les étagères des muséums, déjà bien remplies (60 millions de spécimens dans celui de Paris) sans parler des serveurs ! Selon Gaël Clément, « les responsables de collection donnent en priorité leurs spécimens les plus importants ou rares » mais il reste difficile de « choisir certains spécimens car souvent, le paléontologue ne sait pas ce qu’il va trouver à l’intérieur » nuance Didier Geffard-Kuriyama.

Autre point sur lequel il serait intéressant d’avoir un retour de chercheurs, blogueurs ou journalistes : la disponibilité des données pour les chercheurs n’ayant pas participé à l’étude.Autant le dire tout de suite, les participants que j’ai interrogés ne connaissent absolument pas la licence creative commons et les données n’ont pas l’air de circuler librement dans le monde de la recherche.

Historiquement, les fossiles humains sont rares et jalousement gardés, tout comme leur numérisation, indique Antoine Balzeau, mais les choses évoluent et les paléoanthropologues commencent à partager des informations plus librement comme dans le cas de l’homme de Florès .

Au-delà du monde de la recherche, Philippe Taquet a également suggéré que ces données puissent être fournies aux pays émergents, « dont une partie de leur patrimoine qui se trouve dans nos muséums » et pourquoi pas au grand public, on peut toujours rêver…

>> Article initialement publié sur Quand les singes prennent le thé

>> Photos CC FlickR : Andres Rueda, seriykotik1070, Bolt of Blue

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Cap-sciences.num ou la métamorphose numérique d’un CCSTI http://owni.fr/2010/11/04/cap-sciences-num-ou-la-metamorphose-numerique-d%e2%80%99un-ccsti/ http://owni.fr/2010/11/04/cap-sciences-num-ou-la-metamorphose-numerique-d%e2%80%99un-ccsti/#comments Thu, 04 Nov 2010 16:47:16 +0000 Marion Sabourdy http://owni.fr/?p=33226 Trois ans. C’est le temps que Cap sciences – le Centre de Culture Scientifique, Technique et Industrielle (CCSTI) de la ville de Bordeaux - s’est donné pour transformer entièrement son fonctionnement en passant au numérique. Un gros challenge à entendre Jean-Alain Pigearias :

Cap-sciences.num fait bouger les lignes. Il impacte directement tous les salariés et doit être transversal pour ne pas gaspiller du temps. C’est un projet profondément culturel car il agit en même temps sur plusieurs leviers”

L’édition, l’exposition et la médiation en chantier

Du côté de l’édition, une plateforme multimédia d’information scientifique régionale, Infosciences-Aquitaine a été lancée le 25 septembre 2009. Elle témoigne de l’ensemble de l’actualité régionale de l’innovation scientifique, technique et industrielle. Une sorte d’alter-égo scientifique de la rédaction de Sud Ouest, installée juste en face du centre, sur l’autre rive de la Garonne.

Coordonnée par le journaliste Alexandre Marsat, elle comprend des reportages écrits, vidéos, sonores et photographiques.

« Infosciences permettra de rassembler sur un seul site toute la production éditoriale de Cap sciences. Aussi bien le magazine et la revue que les textes affichés dans les expositions »

nous explique le journaliste. Sans oublier les portraits de chercheurs, les reportages dans les laboratoires, les émissions de radio, la webTV et les dossiers thématiques sur la recherche et l’innovation.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

L’équipe procède donc à la numérisation d’un grand nombre de contenus déjà existant et tente de mettre au point une chaîne d’édition pour les futurs contenus :

« A partir du synopsis d’une exposition, nous souhaitons produire un dossier de presse, les communiqués de presse, une newsletter, des dossiers pour l’itinérance de l’exposition, etc. ».

Un projet qui permettra de revaloriser les contenus, faire revivre les anciennes expositions et de toucher un public différent, comme par exemple les étudiants avec la web-radio.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Du côté des expositions, le numérique s’intègre petit à petit pour offrir plus de contenus accessibles selon les profils et choix des visiteurs. Ces nouveautés ont été testées pour la première fois en février dernier avec l’exposition “Consom’Attitudes“. C’est dans ce cadre que l’équipe de Cap sciences a testé pour la première fois la technologie Visite Interactive Personnalisée (VIP).

La puce RFID comme accessoire de la visite muséale

A l’entrée de l’exposition, le visiteur se voit délivrer une carte munie d’une puce RFID (le numpass ou navinum). Il y enregistre d’abord de manière anonyme quelques données sur son profil, qui peuvent servir à des projets de recherche. Plus tard, ces données pourront également servir à une adaptation du niveau de l’exposition à son âge, ses centres d’intérêts ou sa nationalité.

Pendant toute la durée de sa visite, il enregistre ses réponses aux différentes questions sur des bornes spéciales, les numport. A son retour chez lui, le visiteur pourra se connecter à son espace privé sur le site de l’exposition, créer un compte à partir de son numéro de puce, comparer son parcours et ses réponses à ceux d’autres visiteurs, revoir l’exposition, refaire les jeux pour améliorer son score ou encore commenter les articles.

Notre spectateur lambda est alors devenu un sciencesOnaute. Sébastien Cursan, le responsable de la médiation numérique évoque un projet d’aménager la médiathèque du centre pour avoir accès à la galaxie des sciencesOnautes et voir la communauté évoluer en direct.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Sébastien a entamé une réflexion sur la “mise en scène des savoirs. Les responsables de Cap sciences souhaiteraient proposer une navigation dans un milieu éclaté, ou tous les contenus sont présents simultanément pour désorienter volontairement le visiteur, comme le fait par exemple l’entreprise de design d’espaces Electronic Shadow

À noter tout de même, pour l’instant, l’absence de messages privés ou d’interaction directe entre les scienceOnautes, ce qui limite l’expansion d’une véritable communauté. Les membres de Cap sciences poursuivent leurs efforts pour intégrer petit à petit le numérique dans tout le bâtiment et inversement créer des expositions entièrement virtuelles présentées dans plusieurs sites internet « satellites » du principal.

Un laboratoire d’observation des nouvelles pratiques

Dernier chantier et pas des moindres : la médiation. On peut même le considérer comme le plus dur, car le plus transversal. Il concerne à la fois la rencontre avec le public dans le centre et l’animation de la communauté sur internet (voir le compte Twitter et la page fan Facebook encore en “rodage”).

Cap sciences souhaite se positionner comme un lieu où s’articulent le monde virtuel et le réel,

« une zone de frottement entre ces deux mondes, un laboratoire d’observation de nouvelles pratiques »

précise Sébastien. Malgré une réticente de certains membres du CCSTI vis-à-vis du numérique, Sébastien, Alexandre et le webmaster Vincent Clarenc ont lancé le projet de Studio Cap sciences. Les trois hommes, jusqu’ici éclatés géographiquement, se rassemblent dans un même lieu pour coordonner leur travail et faire prendre conscience des changements que le numérique induit.

En tant que médiateur formé « à l’ancienne », Sébastien Cursan se demande :

« Quand un visiteur entre à Cap sciences ou quand un internaute arrive sur le site : quelle aventure peut-on lui proposer ? Comment l’impliquer dans un récit, notamment via le numérique ? ».

La réflexion concerne donc la déambulation physique dans le bâtiment et virtuelle sur les sites. Le jeune homme n’a pas été choisi au hasard. Il a déjà été animateur sur l’exposition « Planète numérique » en 2000 et travaille actuellement à « Numériquement vôtre », créée par l’Espace des sciences à Rennes.

Pour « Consomm’Attitudes », il a étudié avec un stagiaire l’impact du numérique sur le public et les animateurs, notamment la  façon dont ces personnes s’approprient les outils comme la puce RFID.

Du côté des animateurs :

« nous avons observé la manière dont ils se servaient des outils numériques. Ceux-ci étaient-ils utilisés pour mieux vulgariser ou au contraire constituaient-ils un frein à l’animation ? ».

Du côté des visiteurs :

« nous donnions des explications avant l’entrée dans l’exposition. Ce travail d’observation et d’accompagnement sur les outils n’est jamais fait dans les autres CCSTI ».

Et le public n’est pas le seul à devoir être rassuré. Le passage au « tout numérique » inquiète visiblement les médiateurs. Bugs, perte de contrôle, de temps, du contact humain, non maîtrise de l’outil, évaluation du travail sur de nouveaux critères, « traces » indésirables sur les réseaux sociaux voire disparition pure et simple du métier de médiateur… La liste des peurs est longue et freine certains membres du CCSTI dans leur appropriation du numérique.

Pour atténuer ces angoisses et rendre le site plus attractif, Vincent propose de nombreuses idées : petites vidéos filmées « à la Antoine de Maximy » caméra à l’épaule dans le centre, interviews de 1 à 2 minutes des conseillers scientifiques quand ils se déplacent au CCSTI, interface du site plus riche, activité plus importante sur les réseaux sociaux… Le webmaster prend comme exemple le Muséum de Toulouse pour ses activités sur le web.

Les enjeux économiques, politiques et culturels de Cap-science.num sont nombreux et découleront des choix actuels. Ce projet n’est visiblement pas un gadget dans l’arsenal du CCSTI bordelais mais il n’est pas encore pleinement opérationnel. La réflexion que mène le centre prouve qu’il a un rôle à jouer au sein des structures françaises de culture scientifique, afin de rester prescripteur dans ce domaine.

>> Images CC Flickr : Knowtex.

>> Article initialement publié sur le Knowtex blog

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Énergies, un défi pour le 21ème siècle http://owni.fr/2010/10/11/energies-un-defi-pour-le-21eme-siecle/ http://owni.fr/2010/10/11/energies-un-defi-pour-le-21eme-siecle/#comments Sun, 10 Oct 2010 22:32:45 +0000 Marion Sabourdy http://owni.fr/?p=83 Deux doigts pincent un curseur sur lequel sont inscrits divers logos liés à l’énergie, ainsi qu’un gros point d’interrogation rouge. L’affiche est sobre, tout comme le titre : “Expo Énergies“. Autant vous dire que Gayané et moi souhaitions en savoir plus lors de notre venue à la Cité des sciences ce jeudi 7 octobre (1).

Arrivées au premier étage de la Cité, nous tombons nez à nez avec des sondes d’exploration et une pompe à pétrole dite « tête de cheval », des porte-crayons de combustible nucléaire, des panneaux solaires, une roue de barrage hydraulique et une petite éolienne. Pierre Duconseille, commissaire et chef de projet, explique :

En préambule, nous avons voulu présenter des objets concrets et impressionnants en rapport avec l’énergie, qui est un concept plutôt abstrait. Il existe déjà beaucoup d’expositions sur l’énergie mais elles sont plutôt thématiques. Celle-ci s’intéresse à la globalité de la problématique et notamment aux enjeux sociaux.

Patrick Maury, un des deux muséographes prend le relai pour nous accompagner dans l’exposition. Peu d’images dans la première partie, le gris métallisé domine. On découvre où se cache l’énergie : à l’état brut dans la nature et de manière peut-être plus inattendue dans les êtres vivants.

Les visiteurs peuvent calculer l’énergie qui leur est nécessaire dans une journée. Pour un homme très actif, on l’estime à 4000 calories par jour, soit 0,5 litre d’équivalent pétrole. Vous l’aurez compris, l’exposition donne en permanence des ordres de grandeur à nos petits cerveaux perdus dans ce domaine.

Le focus est mis ensuite sur la France, avec des détails chiffrés grâce à l’Ademe par secteur (habitat, industrie, agriculture, transports…) et filière d’énergie (charbon, gaz, nucléaire, solaire…). Le consommateur apprend combien d’énergie il a fallu pour fabriquer/transporter/utiliser/recycler son téléphone portable et remonte la filière qui a amené jusqu’à son électricité domestique.

La perspective historique n’est pas oubliée (et remonte à la découverte du feu il y a – 500 000 ans) pas plus que l’ouverture sur le monde. En 1900, chaque terrien utilisait 2,2 litres d’équivalent pétrole par jour en moyenne pour vivre et 5,4 litres en 2000 (9,3 pour les français), sachant que nous sommes passés dans ce laps de temps de 1,6 milliards à 6 milliards d’humains sur Terre. Quelle sera la situation dans 50 ans ?

La deuxième partie de l’exposition se passe dans un énorme cylindre, « symbole du chantier et de tous les problèmes qui restent à résoudre dans le domaine de l’énergie » explique Pierre Duconseille. Tout l’intérieur du cylindre est décoré par des projections d’images et par un anneau constitué de nombreux écrans tactiles accolés. La partie supérieure présente les contraintes qui pèsent sur nous (climatique, démographique et la raréfaction des énergies fossiles), ainsi que les solutions proposées, au nombre de trois également : la recherche scientifique, la régulation ainsi qu’une consommation plus responsable.

Les détails de ces solutions sont donnés en 18 thématiques sur les 30 mètres d’écrans tactiles représentant un paysage qui tourne lentement sur 360°. D’après Matteo Merzagora, le muséographe qui a produit les contenus présentés sur le dispositif numérique, « il faudrait environ trois heures pour tout voir ». Quatre tables multi-touch complètent le dispositif avec des jeux collectifs sur la gestion responsable de l’énergie.

La sensation qui se dégage de cette installation est plutôt apaisante mais elle peut vite devenir hypnotisante lorsqu’un compteur des émissions de CO2 depuis 2000 se met à tourner au-dessus de votre tête. En bref, une exposition utile dans sa première partie avec des rappels essentiels et ludique mais néanmoins dense dans le cylindre. Àconseiller à ceux qui aiment les expos où il faut engager une certaine réflexion.

1. Les cimaises sont déjà en place depuis juin dernier mais des problèmes techniques ont repoussé l’ouverture complète de l’exposition au public

Images CC Flickr : Knowtex.

>> Billet initialement publié sur le Knowtex Blog.

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