Une journée de la laïcité ?

Le 19 mars 2010

Stéphane Favereaux revient sur l'un des principe fondateur de notre République, le principe de laïcité. Il en appelle à la création d'une journée de la laïcité, faisant écho à une récente proposition de loi.

Le 24 février 2010, Jacques Myard, député, déposait à l’Assemblée Nationale un projet de loi pour ne pas oublier que nous vivons dans un état laïc depuis que la loi de 1905 a été votée.

Le principe de la laïcité doit rester un des acquis fondamentaux de la République. Depuis que la loi du 9 décembre 1905 instaurant la séparation de l’Église et de l’État est inscrite dans les valeurs de la République, les tensions politico- religieuses qui caractérisaient  la société française depuis la Révolution s’étaient progressivement apaisé. Les sphères politiques et religieuses se séparaient clairement.

Bonjour, tu aimes la laïcité

Bonjour, tu aimes la laïcité ?

La laïcité devenue constitutionnelle depuis 1946, rappelée en 1958 dans le préambule de la Constitution du 4 octobre, n’est pas une simple déclaration de principe dont on peut faire ce que l’on veut en fonction des vents politiques, sociaux, sociétaux, religieux et des faits d’actualité.

Il peut paraître étonnant de voir apparaître sur l’Owni un article sur la laïcité, pourtant le fait religieux évolue depuis plusieurs années, et il évolue au-delà les faits de censure, de désinformation au nom de principe religieux, sur le Net comme dans la société.  Les groupes religieux n’hésitent plus à faire pressions sur les enseignants, sur les blogueurs, les médias…

Pourtant, cette loi de 1905 constitue un socle fondamental du pacte républicain. Elle reste garante d’une véritable paix civile, sociale, loin de toute forme de querelle religieuse dont l’histoire de France est émaillée. Les attaques systématiques, systémiques, contre cette loi sont aujourd’hui de plus en plus fréquentes.

L’éducation en est en partie responsable. Le civisme dont tous les médias tirent des conclusions hâtives n’est plus prioritaire, l’éducation fait de plus en plus défaut dans les dernières décisions ministérielles qui concernent l’Histoire. Sans Histoire, comment un élève, quel que soit son niveau, peut-il se situer dans sa propre histoire ?

Sans un accès au savoir et sans le développement nécessaire de la curiosité sur le fait social et sa compréhension, nulle possibilité de développer une volonté d’implication sociale, nulle possibilité de mobiliser pour défendre des valeurs républicaines, sociales. De fait, cette journée de la laïcité s’inscrit dans cette volonté de ne pas oublier que les services publics, que l’État au-delà, la société en général, se doit d’être neutre quant au fait religieux qui demeure à ce jour méconnu des jeunes générations. S’il l’est, il est souvent caricatural.

Les jeunes caricaturent souvent le fait religieux

Les jeunes caricaturent souvent le fait religieux

En mettant en avant le principe de neutralité religieuse, de liberté individuelle, le législateur est régulièrement intervenu pour rappeler et réaffirmer le principe de laïcité. La loi du 15 mars 2004 encadrant le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans tous les espaces publics revient donc sur cette loi de 1905. Le récent « débat » sur le port de la burqa nous rappelle également à une vigilance sur ce thème.

Cependant, le comportement de certains groupes religieux, quelle que soit la religion, dont les motivations sont très clairement politiques, vise à imposer par des pressions sur les élus des lois sapant ce principe constitutionnel fondamental. Une partie des dirigeants politiques eux-mêmes semble prête à remettre en cause le principe de laïcité.  Les pouvoirs publics doivent pourtant impérativement le faire respecter dans la sphère publique.

Le retour des expériences rappelle donc que l’éducation est essentielle : « Toute génération nouvelle est un peuple nouveau » dit Toqueville. Il est nécessaire de rappeler ces principes, de rappeler le fait historique, religieux, de telle manière que la perception sociale ne soit pas faussée par les discours factuels que l’on peut trouver dans les médias, à la vision essentiellement parcellaire voire spectaculaire fondée d’abord sur une actualité immédiate souvent mal contextualisée et conceptualisée.

La défense de toutes nos libertés, qu’il s’agisse de la liberté d’information, de la liberté d’expression, des libertés sur Internet que les dispositifs légaux actuellement en débat mettent à mal, est essentielle. Il convient d’enseigner en permanence aux jeunes générations le cadre laïc républicain et les valeurs corollaires que cela implique : tolérance, ouverture d’esprit, ouverture à l’autre, curiosité, etc.

Une journée de la laïcité peut-être considérée comme vaguement symbolique. Elle est pourtant  parfaitement opportune en ceci qu’elle rappelle à tous les piliers républicains. Que cette journée soit abordée à l’occasion de discussion dans les écoles, collèges et lycées, dans les médias permettra de rappeler que les combats sociaux qui ont abouti avec la loi de 1905 sont d’abord des combats qui ont permis de fonder une société équilibrée.  L’actualité immédiate fragilise ce principe, il faut donc permettre à la société de se souvenir de ces combats et de ses implications.

Toute la société, tous les médias sont concernés.

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PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Le 9 décembre de chaque année est déclarée journée nationale de la laïcité.

Article 2

Dans tous les établissements d’enseignement, les enseignants consacrent une partie des cours de la journée à des exposés et à des discussions sur le principe de la laïcité dans la société française.

Article 3

Les services publics radios et audiovisuels traitent dans leurs programmes de laïcité.

> Illustration par Capt. Tim sur Flickr

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